Issiakhem, la face oubliée de l’artiste, œuvres graphiques

Auteur : Nadira Laggoune- Aklouche

Date de parution : 2007

ISBN : 978-9947-O-1613-8

Dépôt Légal : 642 - 2007

Nombre de pages : 117

Langue : Français

Depuis plus de quarante années, Djâafar InaI n’a eu de cesse de  rassembler et de suivre à la trace non seulement tout l’œuvre d’Issiakhem, mais aussi toute information le concernant, veillant avec persévérance à sa diffusion. Ami intime de l’artiste, il reste aujourd’hui le principal gardien de sa mémoire, affirmant : « …Issiakhem doit être avant tout connu dans son pays. Une œuvre a été créée pour être lue public… ».

La plupart des publications autour d’Issiakhem, l’ont été grâce à l’immense fonde documentaire qu’il a réuni et traité ; sans lui ce travail n’aurait certainement jamais vu le jour et à ce titre, il ne est quelque part l’auteur spirituel.

Beaucoup plus que de remerciements, il est question ici de reconnaissance et d’admiration pour sa confiance et sa ténacité dans l’écriture de l’histoire de la peinture algérienne.

Aujourd’hui encore, l’œuvre d’Issiakhem, disséminée, reste méconnue du grand public. Ce même grand public qui ne retient de lui que des images de femme tragique, au visage tourmenté ou l’accident terrible qui a bouleversé sa vie.

La presse elle-même a sublimé sa vie personnelle au détriment de son œuvre, faisant de son destin la raison unique de sa création ; ne brossant souvent de lui que le portait d’un personnage tourmenté, excessif et coléreux comme si son art n’était déterminé que par son caractère.

La peinture est un monde qui l’a habité tout entier, un refuge contre les vicissitudes du monde, un cri de révolte ; elle fut toute sa vie si présente, qu’elle occulta le reste de ses activités graphiques. Et pourtant, bien que considérées par certains comme «accessoires », moins intéressantes ou relevant de « l’alimentaire », il n’en demeure pas moins qu’il en était l’auteur délibéré et convaincu.

Dans cette investigation autour de l’œuvre et de l’artiste, on découvre une facette oubliée ou méconnue de sa vie productive ; au première abord, celle-ci semble en contradiction avec ce que l’on donne habituellement à voir de son œuvre, une peinture expressionniste de la douleur humaine, dont la valeur esthétique reconnue n’est plus à remettre en question ; mais c’est vraiment une apparence, car le travail fourni pendant des années dans la presse, dans l’édition ou  du fait de la commande publique, s’il est parfois insolite ou inattendu, ne se distingue pas vraiment des convections profondes qu’il affirme dans sa peinture.

Chez n’importe quel artiste, toute œuvre est importante parce qu’elle est représentative de lui-même, de ses origines, du milieu auquel il appartient et surtout de sa société, des images et des choses auxquelles celle-ci s’attache. Il est donc normal  qu’existent des différences dans l’ouvre selon les périodes et les influence de l’histoire.

Pour Issiakhem, qui est un artiste qui vit les choses de manière aussi entière, tout ce qu’il fait semble l’être dans la passion et la même foi se retrouve partout dans l’ouvre, aussi minime que soit celle-ci.

Ses dessins de presse, caricatures, illustartions et même billets de banque sont témoins de cet engagement pour des causes qui lui semblent justes. Ce besoin de rapproche l’art du peuple tel qu’il l’a toujours proclamé comme nécessaire en parlant de la peinture, parait évident dans ce type de travail.

Il est vrai que souvent ce principe (de l’engagement) est perçu comme radical et qu’il en découle des réductions et des exagérations qu’il assume avec provocation ; est-ce par excès de sincérité ? Par démagogie ? Par révolte contre la condition humaine ?

L’intérêt pour toues ces questions motive cette recherche en même temps qu’il est le prétexte  pour aborder la découverte de l’artiste par un coté inédit.

Au-delà de l’artiste lui-même, il y a l’importance du témoignage des œuvre pour des moments de l’histoire (et des moments de l’art) qui, aujourd’hui, paraissent désuets ou dépassés parce que l’on n’en retient que les clichés auxquels ils sont réduits. C’est le cas d’un certain « art engagé », crucial à un moment donné de l’histoire de l’art algérien et toujours d’actualité, qui est fixé dans ces images qu’il a produites.

La liste de l’œuvre présentée dans ce travail n’est pas exhaustive, du fait de la difficulté rencontrée pour se procurer tous ses travaux. Dispersée, non publiée ou d’accès difficile (certaines archives étant presque inaccessible) l’iconographie qui a pu être rassemblée ici donne un aperçu tout à fait appréciable de l’ensemble de ce qu’il produit, disons, hors du champ  « sacré »de la peinture.

Il est forcement difficile aujourd’hui de parler, sans le sacraliser, d’un artiste de plus en plus idéalisé, du fait d’abord de sa disparition et des témoignages plus affectifs qu’objectifs qui se transmettent sur lui de bouche à oreille, mais surtout à cause de la rareté des écrits spécialisés et de la recherche autour de lui et de son œuvre.

Il ne faudra donc pas chercher dans cet ouvrage des détails plus ou moins anecdotiques de sa vie, pas plus que le récit de ses aventures ou de ses coups d’éclat ; si la vie de l’homme fait l’artiste, l’art découvre en lui une autre dimension.

Il n’est pas question non plus de « démystification », mais de se rapproche de l’homme, de dévoiler une facette de son travail en essayant de distancer cette sublimation qui peut dénaturer le sens de l’œuvre.

C’est cela que nous attacherons à mettre en évidence, dans la plus grande clarté et objectivité possibles, ouvrant la voie à toutes interprétations futures, car le champ de l’art, vivant, peut être revisité à tout moment.